lundi 15 juin 2009

Portraits béninois

Les portraits qui suivent sont des rencontres avec des photographes béninois. C'est aussi une rencontre avec Jeanne et Baptiste, d'Afrique in visu, la plateforme d'échanges autour du métier de photographe en Afrique pour qui j'ai écris les deux chroniques suivantes l'année passée. Je souhaitais vous les faire découvrir au travers de l'Arbre à palabre.

Pour retrouver ces deux articles sur le site d'Afrique in visu cliquez ici. Afrique in visu fait parti des sites coup de cœur de l'Arbre à palabre, vous pouvez les retrouver dans la rubrique "Ici ou ailleurs"

Incontournable Charles Placide



Charles Placide est l’un des photographes incontournables de Cotonou au Bénin. J’ai souhaité lui laisser la parole pour se présenter à vous. Magneto…

« Je m'appelle Charles Placide. Je suis photographe.
J'ai commencé en 1992 dans un studio à Cotonou. Le studio était tenu par un de mes amis. J'allais souvent l'assister. On bavardait beaucoup. J'admirai beaucoup ce métier qui est devenu une passion, pour moi, du jour au lendemain. Un jour je lui ai demandé de m'apprendre la photographie. Manuellement, il m'a donné des repères sur l'appareil photo pour prendre des gens assis et debout. Un jour il est parti en vacances, et il m'a demandé de reprendre le studio pendant les deux semaines de son absence. C'est ainsi que j'ai commencé. A son retour, j'ai pris goût à la photographie et j'ai arrêté l'école pour l'assisté de façon permanente.
Ensuite, je suis devenu autodidacte jusqu'en 1994 où je photographiais les baptêmes, les mariages...
Fin 1994, j'ai rencontré Erick Ahounou, photographe de presse. J'ai commencé à travailler avec lui en tant qu'assistant, jusqu'en 1996, l'année de la création du journal Les Echos du jour dans lequel je me suis fait embaucher.
Aujourd'hui, je travaille en indépendant pour la presse béninoise et aussi en tant que correspondant de l'agence Reuters et Afrikimages. »


Charles Placide est autodidacte.
Excepté les studios de formation, il existe à présent des écoles de formation en photojournalisme ici à Cotonou.

Charles Placide réalise également des photographies d'art telles que des photographies de nus. Cette idée lui est venue d'un vieux livre acheté pendant sa formation à Dakar. Intrigué par la démarche de l'artiste qui photographiait avec sa sensibilité le bout des seins, il a voulu élargir le champ de cette recherche pour ne pas le plagier. Il a donc commencé à photographier des fragments de parties sensibles du corps féminin. L'artiste a choisi des fragments pour ne pas dévoiler l'identité de la femme. En effet, au Bénin il y a beaucoup trop d'interdits. On ne peut pas photographier une femme dans son entièreté.

Par ailleurs, l'artiste commence également à photographier des scènes de vodoun.
Inspiré par Pierre Verger, l'artiste s'est dit qu'on ne pouvait pas laisser un français nous parler du vodoun par ses photographies, alors qu'il y a des béninois photographes.



Sur la route de Rafiy Okefolahan

On entre chez Rafiy Okefolahan par une petite cour.Des hauts de boumba et autres tissus à motifs très colorés sèchent au soleil.Il fait chaud et moite. Nous sommes à Cotonou, capitale économique et effervescente du Bénin. Son atelier se trouve dans un quartier du bord de mer, Fidjrossè. Rafiy, nous ouvre sa porte, un large sourire aux lèvres.



Bonjour Rafiy, peux-tu me parler un peu de toi et de ton parcours?
Je suis artiste-plasticien et photographe natif de Porto-Novo.
Autodidacte. Au début, je peignais sur des toiles de jute du figuratif avec beaucoup de couleurs… c’est ce qui se vendait le mieux.
Un jour, j’ai rencontré un artiste togolais qui m’a appris que l’on pouvait peindre autrement, avec une démarche artistique, une suite logique dans le travail. Je suis resté à travailler dans son atelier pendant un an.
Puis j’ai eu la joie de faire une année à l’Ecole Nationale de Arts de Dakar, ainsi que plusieurs ateliers au Sénégal avec des artistes de diverses nationalités.
C’est à ce moment que j’ai découvert d’autres techniques comme la peinture sous-verre que j’ai développé et la photographie.
J’ai donc commencé à suivre quelques photographes dans leur travail, et je me suis mis à photographier mon entourage, les maisons, l’architecture, des linges suspendus dans des cours. Quand je suis revenu à Cotonou, j’ai choisi de travailler sur l'environnement en s'inspirant des déchets en prenant en photo les ordures. Je trouvais que les formes et les couleurs ressemblaient à des toiles que j’avais vu de Jackson Pollock. C’est à la dernière Biennale de Dakar en 2008, qu’en discutant avec des photographes, je me suis dit que je pouvais moi aussi faire de la photographie tout en ayant une véritable démarche. Je me suis lancé.

Tout en parlant, Rafiy fait défiler sur son ordinateur toutes sortes de clichés tantôt en couleur, tantôt en noir et blanc. Assis sur de jolis coussins fleuris posés sur des nattes, entre deux sodas et quelques cacahuètes, nous poursuivons :

Peux-tu nous parler de cette démarche que tu développes actuellement en photographie ?

J’ai intitulé mon dernier projet « Alice au pays des merveilles ».



Ce projet est le fruit de ma rencontre avec Fabiola, une roumaine parachutée au pays du vodoun. C’est son étonnement face à certaines choses, qui pour moi sont anodines, habituelles, qui ont suscité ma curiosité. Par exemple une personne urinant au bord de la voie, une dame transportant une grosse bassine sur la tête, des zemidjans (taxi-moto) véhiculant 4 personnes sur la même moto, etc. Lorsque Fabiola m’a rejoint à Dakar pour la Biennale, nous avons décidé de redescendre à Cotonou par la route. Faire ce bout de chemin ensemble m’a permis d’approfondir ce thème que nous avions commencé au Bénin. Les photographies en noir et blanc me paraissaient très expressives pour mener à bien ce projet.




Un regard croisé en soi.
Un jeu de miroir ou comment par leurs errances deux personnes (re)découvrent, une, voire des Afriques, à travers le regard de l’autre.
Rafiy d’ajouter à mon interrogation sur ces multiples voyages qu’il cherche à s’affirmer, se trouver parmi ces Afriques traversées. Trouver en quelque sorte son identité car ce n’est pas parce que l’on est natif de quelque part qu’on ne peut pas trouver son identité ailleurs.



Fabiola me glisse quelques mots de Lewis Caroll extraits d’«Alice au pays des merveilles» en fin d’après-midi. Ces quelques mots savoureux suffiront à clore cette belle rencontre et à résumer le merveilleux parcours de Rafiy.

Alice au chat :
« Voudriez-vous me dire, s’il vous plaît, par où je dois m’en aller d’ici ?
- Cela dépend beaucoup de l’endroit où tu veux aller.
- Peu m’importe l’endroit…
- En ce cas, peu importe la route que tu prendras.
- … pourvu que j’arrive quelque part, ajoute Alice en guise d’explication
- Oh, tu ne manqueras pas d’arriver quelques part, si tu marches assez longtemps »

vendredi 5 juin 2009

Rencontre littéraire (1)

En parcourant les librairies ces derniers temps, je suis tombée un peu par hasard sur un ouvrage destiné au Bénin.


















Celui-ci, bien que pas très beau graphiquement m'a donné un joli sourire en y voyant photographiées et interviewées des personnes que j'avais rencontrées à Cotonou !

Bien illustré, ce livre vaut vraiment le détour.

Vous pourrez y voir par ordre d'apparition : Marie-Cécile Zinsou, Simonet Biokou, Lolo Andoche, Camille Amouro, Florent Couao-Zotti, Alougbine Dine, Charles Placide, Angélique Kidjo ou encore le groupe Ardiess !

• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • "Culture et talents du Bénin - Itinéraire et rencontres"
240 pages, 200 illustrations, 29 €
Somogy - Editions d'art, coédité avec les Musées de Vendée et paru le 15 avril 2009.